• Belle journée à toutes et à tous,

    Félicité est heureuse, son aventure devient vraiment à son goût et ses amis sont au top.

    Elle va enfin découvrir le "secret de Poupy" ....mais qui est Poupy au juste?

    Bon week-end et bizatousssssssssssssss.

    Illustrations : François

    Félicité la tortue - 5

     

    Le secret de Poupy

        
                                           

          Cette nuit-là, Félicité eut bien du mal à s’endormir. Elle se mit alors à rédiger une nouvelle lettre pour raconter à Xavier ses dernières journées. Elle avait aussi, et surtout besoin de ses talents :

    « Salut  Xav’

    Je crois que la Bretagne est en train de me livrer certains de ses secrets et qu’elle n’a pas fini de me surprendre… ». Elle réfléchit un instant et décida de n’omettre aucun détail de son aventure, elle écrivit pendant des heures et insista sur le fait qu’il ne lui restait plus que sa petite pochette contenant quelques pièces de monnaie… et son portable : « J’attends de savoir ce que ce korrigan manigance et ce qu’il me veut, et bien sûr je te raconterai tout en détails… » Elle hésita un peu et termina ainsi, assez pompeusement il faut bien le dire : « comme tu peux le constater, j’ai une mission à accomplir. Je ne sais pas encore de quoi il s’agit mais j’aurai probablement besoin d’une voiture assez puissante pour la réaliser…tu sais, un peu comme celle de James Bond…et puis, plus vite je viendrai à bout de ma tâche, plus vite je reviendrai à la maison. Allez, je sais que tu meurs d’envie de dessiner ce modèle ! Merci mon petit Xav’, tu es un père pour moi ! ». Satisfaite, Félicité plia ses feuillets, les mit sous enveloppe, colla un joli timbre représentant le golfe du Morbihan vu du ciel et partit « rapidement » poster sa lettre.

    8h45 : Félicité, Mirabelle et Loïg abandonnèrent la voiture sur le bas-côté du chemin, déterminés à gravir les derniers mètres de la colline pour prendre un délicieux bol d’air et mieux apprécier le charme et l’harmonie de la végétation environnante, son parfum et ses coloris. L’or des ajoncs ne se mariait-il pas à la perfection avec le mauve de la bruyère ? Au fur et à mesure qu’ils grimpaient (enfin, surtout Félicité et Loïg ! Mirabelle se contentant de voler au-dessus de leurs têtes !), Ils étaient littéralement conquis par la splendeur du panorama qui s’offrait à eux. La vue bien dégagée à cette heure du jour, et sans doute pour peu de temps, leur permettait de contempler une bonne partie de la côte bretonne, la rade de Brest, la découpe originale de la presqu’île du Crozon et même la magnifique baie de Douarnenez.

    Arrivés au sommet, ils restèrent longtemps à scruter et discuter des moindres détails de ce point de vue…en attendant... Brusquement, le ciel se couvrit de nuages gris et une fine bruine commença à masquer le paysage.

    Mirabelle en profita pour prendre congé de ses amis, prétextant une trop longue absence auprès des siens. Elle promit bien sûr de revenir très vite et Félicité la regarda s’éloigner, petite tache blanche dans le ciel argenté.

    -         « 9h04 » annonça Loïg à Félicité qui n’en finissait pas de dévisager les moniteurs de l’école de parapente.

    Félicité la tortue - 5

    Après avoir soigneusement préparé leur matériel, ils commençaient déjà à envoyer les premiers casse-cou s’élancer dans les airs. Un léger crachin perlait le long des voiles multicolores qui se perdaient mollement dans la brume montant petit à petit sur la colline.

    On entendit alors le vrombissement d’un moteur, et, sortant comme par magie du brouillard qui s’intensifiait, le scooter rose apparut enfin ! Poupy, le korrigan, à moitié caché par son casque, s’arrêta devant Félicité qui ne put retenir une exclamation de surprise:

    -         9h06 ! Je suis pile poil à l’heure s’écria Poupy d’une voix très douce qui ne correspondait guère à son personnage.

     Avec son long nez qui lui mangeait la moitié du visage, ses yeux moqueurs, ses oreilles démesurées et ses cheveux noirs sortant d’un chapeau pointu, il avait l’air de… de quoi au juste ? D’un gnome tout simplement. A cela s’ajoutait une tenue extravagante qui elle, lui allait plutôt à merveille : Petit caraco de cuir brun et pantalon de laine à rayures en partie englouti dans des bottines aux extrémités courbées.  

    -         Sézig n’est pas arrivé ? poursuivit le korrigan en jetant un œil en direction de Loïg

    -         Non, il est retenu au phare avec un groupe de touristes, mais je lui ferai part de cette entrevue. Avez-vous encore besoin de nous ? Demanda le potier sans se soucier le moins du monde de Félicité qui resta interloquée.

    -         Non, je pense que notre amie se débrouillera très bien toute seule à présent. Votre frère et vous avez fait du bon travail !

    -         Mais …commença Félicité

    -         Ne nous interrompez pas ! trancha sèchement Poupy en invitant le petit groupe à s’éloigner

    -         On pourrait nous voir ici…venez chez moi.

    -         Chez vous ? mais…

    -         Ah ! Ne nous interrompez pas tout le temps, gronda une fois encore Poupy. Accélérez un peu petite !

    -         Je fais ce que je peux, et puis, expliquez-moi … s’énerva Félicité

    -         C’est ce que j’allais faire, mais ici ! Reprit le korrigan en désignant un énorme bloc de pierre.

    Il s’agissait bien sûr d’un menhir qui pivota sur lui-même avec un bruit sourd lorsque Poupy appuya sur un dessin représentant un triskell gravé sur la pierre.

    L’entrée d’une grotte s’ouvrit alors devant eux. Félicité suivit le korrigan et le potier qui descendaient les quelques marches les séparant d’une caverne très spacieuse meublée de lourdes armoires, de chaises et de tables taillées dans le bois brut, ainsi que de voilages et de tentures multicolores en soies naturelles.

    Chacun prit place autour de la table centrale, et Poupy reprit la parole :

    -         Sachez petite que je vous observe depuis votre arrivée en Bretagne et j’ai compris que toute la magie qui vous entoure pourrait m’être d’un grand secours pour une mission très délicate. Aussi, j’ai tout de suite confié à Sézig et Loïg, deux de mes amis, le soin de vous conduire jusqu’ici.

    Flattée, Félicité se sentit soudain très importante

    -         Ah ? Et de quoi s’agit-il ? demanda-t-elle visiblement ravie

    -         Pas si vite ! J’ai aussi remarqué que vous êtes totalement inconsciente. Vous m’avez donné beaucoup de fil à retordre ces derniers temps pour vous éviter bien des accidents…dès le début de votre aventure lorsque vous avez failli vous fracasser contre les rochers, le jour où votre avion était à deux doigts de se scratcher ou simplement lorsque vous roulez en scooter… un vrai danger public ! …A présent, je ne peux pas vous suivre plus loin, voici donc un talisman qui vous sera très utile.

    Poupy remit à Félicité une petite médaille à son effigie accrochée à une chaînette, et lui conseilla fortement de ne jamais s’en séparer.

    -         Mais en quoi pourrais-je vous être utile si je suis un danger public ? S’indigna Félicité un peu vexée, vous avez Loïg et Sézig et puis vous êtes capable de faire des tas de trucs magiques…pas moi.

    -         L’endroit où je vais vous envoyer ne m’est plus accessible, et contrairement à Loïg et Sézig, vous, vous pourrez passer inaperçue.

    La voix de Poupy s’adoucit brusquement jusqu’à devenir inaudible, et contre toute attente, le korrigan si directif et si sûr de lui, presque hautain quelques minutes auparavant…fondit en larmes. Il dévoila alors son terrible secret :

    -         On m’a …volé…mon trésor, commença-t-il entre deux sanglots. Ça s’est…passé à Noël dernier. Il se reprit et continua alors d’une traite. Tu sais Loïg, quand je suis venu au phare pour passer les fêtes avec vous. Vous étiez entre amis, et avec mes copains, on a voulu vous faire une petite blague en vous obligeant à danser toute la nuit autour du menhir de l’île pour vous laisser complètement KO. Quand je suis revenu chez moi, au petit matin, mon trésor avait disparu. C’est le terrible brigand Pati Bulère qui l’avait emporté dans son repaire en plein cœur de la forêt de Brocéliande. 

    Poupy se remit à pleurer de plus belle et termina son récit ainsi :

    -         Pour le récupérer, il faut entrer dans la forêt, mais elle est interdite à qui n’a pas su protéger son trésor ! Je suis banni ! C’est pour cela que j’ai besoin de toi, petite, toi seule peux aller jusqu’à la cabane de Pati Bulère. Personne ne se méfiera d’une tortue… tu pourras t’y faufiler et récupérer mon trésor. Tu comprends ? Sous le coup de l’émotion, Poupy s’était mis à tutoyer Félicité. Heureuse de ce revirement qui la rapprochait davantage de lui, elle continua sur le même ton :

    -         Oui…enfin…non, je ne comprends pas ! Comment sais-tu que ton trésor à été volé par ce brigand-là ? Et comment ferais-je pour le trouver dans cette immense forêt ?

    -         Bon, je vais tout te dire. Il y a plusieurs mois que je le recherche ce trésor, tu penses bien. Il a bien fallu que j’y entre dans cette forêt, mais sous une autre forme…je ne pouvais pas garder mon apparence sous peine d’être repéré ! Je me suis donc transformé en….

    -         En quoi ? S’exclama Félicité qui commençait à comprendre !

    Poupy baissa la tête, et d’une voix carrément imperceptible avoua que Mirabelle la mouette n’était autre que Poupy, le petit korrigan. Il ajouta très vite :

    -         C’est comme ça que j’ai réussi à localiser mon trésor, mais sous cette forme, il m’est impossible de le ramener jusqu’ici.

    -         Moi non plus, trancha Félicité

    -         Si, avec Xavier, tu peux tout faire, et je sais que tu trouveras une solution…Allez, dis oui … dis oui Félicité !!! S’il te plait ! Allez, je te laisse jusqu’à demain matin pour me donner ta réponse, en attendant, tu peux t’initier au parapente !

    -         N’importe quoi !

    -         Je rigole, mais pense à Xavier !

    Félicité la tortue - 5

    Partager via Gmail Yahoo! Pin It

    votre commentaire
  • Belle journée à toutes et à tous,

    Les aventures de Félicité se poursuivent....s'intensifient... avec de nouvelles rencontres ....et un peu de suspens ...et

    Les très jolis dessins de François...

    Bizatousssssssssssss

    Félicité la tortue - 4

    Poupy

      

         Félicité découvrit son nouveau moyen de locomotion sur le terrain de volley du camping. Elle rassembla toutes ses affaires dans sa valise et enfourcha son scooter à l’arrière duquel Mirabelle prit place elle aussi.

    Félicité la tortue - 4

       Une pluie fine commençait à tomber ce qui ne gêna pas pour autant les deux amies qui avaient pris soin de se munir de leur casque, un beau casque rose assorti au scooter. Elles partirent à l’aventure à l’intérieur des terres. Grisées par la vitesse, elles longèrent des canaux entourés de roseaux et prirent des chemins de traverses dans la lande à vive allure. Elles arrivèrent dans un charmant village très  pittoresque avec ses petites boutiques de souvenirs, son immense calvaire de pierre en plein milieu de la place de l’église, et ses artisans qui travaillaient tout autour. Il y avait là une dentellière, un tailleur de pierres et un potier qui travaillait la terre pour fabriquer des vases, des poêlons et de drôles d’objets… Félicité crut même y reconnaître la créature qu’elle avait récemment aperçue à plusieurs reprises :

    -         C’est quoi ?… Des nains de jardin? Demanda-t-elle innocemment à l’homme qui modelait avec un évident plaisir et dont le grand tablier blanc était maculé de terre.

    -         Bien sûr que non ! Répondit-il légèrement vexé pour la confusion, mais heureux que l’on s’intéresse à son ouvrage. Ce sont des farfadets, des gnomes ou des elfes si vous préférez. Celui-ci, c’est un Poulpican et il porte bonheur, expliqua-t-il en lui présentant une poterie représentant une tête rigolote avec une large bouche, des yeux ronds et une grande tige sur le dessus. On dit que ces petits génies sont malins et qu’ils hantent les forêts bretonnes pour faire peur aux promeneurs. Ils sont aussi capables d’exaucer les vœux. Celui qui se procure cette poterie doit allumer une bougie à l’intérieur et faire un vœu. Lorsque la bougie s’éteint, le souhait se réalise.

    -         C’est génial ça ! S’exclama Félicité. Il faut que j’en achète un pour Xavier. Avec ça, il est sûr d’avoir des bonnes notes et Milou arrêtera de le gronder… Et celui-là ? Questionna-t-elle encore en montrant le petit personnage qui l’intriguait tant.

    -         Il est vraiment moche, non ? Ironisa Mirabelle. Tu as vu son grand nez et ses longues oreilles qui sortent de son chapeau…et ses pompes ? Trop drôle ce bout crochu !!

    -         C’est vrai qu’il est un peu repoussant ! reprit la tortue

    -         Ne dis jamais ça à un Korrigan malheureuse ! Il n’aime pas qu’on l’insulte et sa vengeance pourrait être terrible ! Mais rassure-toi, d’habitude il sait se montrer très gentil. Il vit dans une grotte ou un dolmen et ne se montre généralement que la nuit…Savez-vous, poursuivit l’homme d’un ton songeur qu’il est très riche et qu’il garde son trésor au pied d’un menhir ?

    Félicité la tortue - 4

    -         Ah ? C’est quoi un menhir ? Demanda Félicité tout en comparant machinalement cet homme avec le gardien du phare avec qui elle trouvait une étrange ressemblance : même regard profond et doux, même barbe, même gabarit, mais avec en plus des cheveux longs attachés en queue de cheval. Il interrompit sa rêverie en répondant simplement à sa question :

    -         C’est une immense pierre, mais tu en verras bientôt, j’en suis certain. A propos, mon nom est Loïg…

       Mirabelle écoutait distraitement la conversation en regardant autour d’elle à la recherche d’un endroit qui pourrait les accueillir pour déjeuner…elle commençait à avoir très faim.

    -         Regarde ! Là ! Un restaurant. On entre, s’exclama-t-elle soudain en apercevant une vieille demeure de pierres d’où sortait une magnifique enseigne en fer forgé avec en lettres d’or le nom d’une crêperie «Ty Quickos».

    -         Oh, oui, mon ventre commence à gargouiller.

    Elles s’installèrent dans un coin un peu sombre de la salle et considérèrent alternativement la carte et le décor typiquement breton avec ses lourdes armoires de bois ornées de grandes rosaces, ses murs recouverts de pierres, ses  poutres apparentes, et ses assiettes de faïence peintes à la main.

    -         Waouh ! J’ai envie de tout, s'écria Félicité.

    -         Moi, je prendrai seulement une galette avec des noix de Saint-Jacques, du thon, des sardines et des anchois, répliqua Mirabelle.

    -         Il n’y en a pas au menu. Mais tu as raison. Pour moi, une fondue de poireaux me conviendrait parfaitement avec des…

    Elle allait poursuivre, mais la serveuse s’avançait déjà vers elles.

    -         Je vous sers une petite salade verte ? Demanda-t-elle en direction de Félicité, sans même adresser un regard à son amie.

    -         Une salade verte, voyez-vous ça ! Ricana Mirabelle. On n’a pas fait tout ce chemin pour une petite salade !!

    Dépitées, elles commandèrent une dizaine de galette de blé noir et autant de crêpes de froment, au chocolat, au miel et aux amandes et s’empiffrèrent en prenant tout leur temps…Elles terminèrent par une bolée de cidre, et repartirent en vacillant un peu.

        Avant de reprendre la route, elles firent quelques pas dans le village et s’allongèrent à l’ombre d’un puits fleuri qu’elles remarquèrent sur une petite place…là, elles s’endormirent comme des souches.

         Deux heures plus tard elles ouvrirent les yeux …doucement. Elles se regardèrent et se mirent à rire aux éclats en repensant à la scène dans la crêperie.

    -         On a trop mangé !!! Tu ne crois pas ? affirma l’une

    -         On aurait pu éviter la bolée de cidre, non ? continua l’autre

    -         Bof !! C’est fait ! Maintenant, il s’agit de retrouver le scooter.

    Elles reprirent le chemin en sens inverse et parvinrent près de la crêperie. Mais là : pas de scooter !…Elles cherchèrent un peu partout, mais rien ! Pas la moindre trace du véhicule. Félicité s’indigna :

    -         J’le crois pas ! On m’a VOLE mon scooter ! Et ma valise ? Elle était à l’arrière. Je n’ai plus rien. Qu’est ce qu’on fait maintenant?

    -         On écrit à Xavier, répondit tranquillement la mouette. On lui demande de refaire ton stock …et ça ne sera pas trop difficile pour lui de t’envoyer un autre scooter.

    -         Tu crois que c’est simple ! Le temps d’envoyer la lettre, qu’il la lise et qu’il se décide à me dépanner, ça va prendre au moins trois jours.

    -         Et bien, chaque chose en son temps. N’as-tu pas toujours eu de la chance ? C’est d’ailleurs bizarre. Pour le moment, je vais faire un petit vol de  reconnaissance dans le coin.

    Et hop ! Sitôt dit, sitôt fait. Mirabelle n’était déjà plus qu’un petit point dans le ciel.

       Pour calmer son impatience, Félicité entra dans une biscuiterie et se procura tout un assortiment de palets, fines crêpes dentelle auquel elle ajouta un far aux pruneaux et un kouign-aman … « Pour Xavier » se dit-elle. Ce qui ne l’empêcha pas de grignoter la moitié d’un biscuit.

    En sortant, elle repéra sur la porte une affiche annonçant une fête qui devait avoir lieu le soir-même. Elle la lut à haute voix : « Noyal les Grenouilles, grand Fest Noz à partir de 21 heures dans la salle des fêtes avec le groupe Héol Ti-Breizh… Mais, c’est tout près d’ici ! » s’exclama-t-elle sans remarquer qu’elle était observée depuis un moment. Elle se retourna, et c’est là qu’elle vit pour la deuxième fois Loïg le potier qui travaillait le matin même sur la place :

    Félicité la tortue - 4

    -         C’est en effet à deux pas, mais j’ai bien peur que vous ayez du mal à y parvenir avant la nuit sans votre scooter !

    -         Comment savez-vous… ?

    -         J’ai vu Poupy l’emporter tout à l’heure…rien d’étonnant, je vous avais prévenue !

    -         Prévenue ? Et qui est Poupy? C’est la deuxième fois que j’entends ce nom…c’était quand déjà ? Ah oui !! Félicité fouilla dans la petite pochette qui ne la quittait jamais et retrouva la petite phrase que lui avait dite la vieille brodeuse près du puits. Elle tendit le feuillet à Loïg :

    -         Cette phrase signifie : « Tu dois être quelqu’un de très important petite…parce que le bon vieux Poupy veille sur toi ! ». Poupy est un gentil korrigan qui se montre très rarement et seulement à des personnes qui le méritent. Nous ne savons presque rien  de lui et sommes très peu à le rencontrer par ici ! vous avez de la chance, il semble vous apprécier…

    -         En me volant mon scooter ?

    -         Non, ça c’est une blague ! Il en fait souvent. Mais, vous le verrez sûrement bientôt. En attendant, si vous vous n’y voyez pas d’inconvénients, mon taxi vous tend les bras, poursuivit-il en lui désignant une magnifique voiture de sport décapotable flambant neuf.

    -         Saperlipopette ! Ça gagne bien sa vie un potier !! S’exclama Félicité en se dirigeant vers le véhicule.

    -         Eh !! Interpella Mirabelle qui revenait tout juste de son périple, vous alliez partir sans moi ?…Je ne suis pas assez bien pour vous ? En attendant ma jolie, je crois que tu peux faire une croix sur ton scooter. Je n’ai rien aperçu à des kilomètres à la ronde.

    En chemin, Félicité rapporta à son amie les propos du potier. Cette histoire de korrigan la laissait quelque peu perplexe et surtout… sceptique. Elle pensa peut-être à juste titre que Loïg avait eu la main un peu lourde sur le Chouchen.

      

         Félicité ne connaissait pas grand chose aux fêtes bretonnes, et pourtant ce soir-là, elle se fondit dans la foule et ne ménagea pas ses efforts pour s’immiscer dans les rondes qu’elle trouvait « cocasses ».

    -         C’est marrant cette façon qu’ont les gens de se tenir par le petit doigt et de taper du pied avec des sabots pour danser, avait-elle constaté en riant dès son arrivée. 

    Elle sut aussi qu’elle avait une certaine attirance pour le biniou, la bombarde et la harpe celtique, et s’amusa follement. Elle dansa à s’étourdir pendant des heures sans même remarquer que dans le groupe de chanteurs, celui qui portait les cheveux les plus longs sous son chapeau rond n’était autre que  Poupy… qui l’observait discrètement… 

     

        Tard dans la soirée, Loïg s’approcha d’elle et lui remit un parchemin roulé et entouré d’un ruban rose « de la part de Poupy ». Surprise, Félicité regarda autour d’elle mais ne vit que ses amis qui attendaient qu’elle le déroule. Elle lut à haute voix le message qu’il contenait :

    -         « Rendez-vous demain à 9h06 sur le sommet principal du Ménez-Hom. J’ai une mission pour toi. Tu me trouveras derrière l’école de parapente». C’est tout !! Il se fit un silence étrange que Loïg rompit en s’exclamant :

    -         Une mission ? Je crois bien que l’on va enfin connaître le secret de Poupy…mais vous savez, c’est quand même assez loin d’ici ! Il faut beaucoup grimper ! Je vais vous y conduire…d’ailleurs, cette histoire m’amuse beaucoup et il faut avouer que je suis très curieux… Pour le moment, nous avons tous besoin d’une bonne nuit de sommeil. Vous pouvez dormir dans mon atelier, il y a une banquette assez confortable et quelques couvertures. Je viendrai vous chercher très tôt demain matin.

     

    Partager via Gmail Yahoo! Pin It

    votre commentaire
  • Belle journée à toutes et à tous,

    Heureuse en Bretagne, Félicité se décide à écrire une longue lettre à son ami

    Les aventures se poursuivent pour Félicité qui n'est pas au bout de ses surprises...

    Avec toujours, bien sûr, les jolies illustrations de François

    Bizatousssssssssssss

    Félicité la tortue - 3

    Une longue lettre

     

         Chaque jour, Xavier surveillait sa boite aux lettres, et il dut attendre quatre jours avant de voir le facteur y glisser une enveloppe verte portant son nom. Il prit le courrier, déposa sur la table du salon celui adressé à ses parents et emporta sa lettre dans sa chambre pour la lire tranquillement.

        Allongé sur son lit, il déploya devant lui les cinq pages écrites par Félicité et commença sa lecture. Elle lui exposait en détails sa première journée, sa rencontre avec le gardien de phare, et sa traversée jusqu’à la pointe du Finistère:

    « Dès que le chalut était remonté et hissé sur le pont, des centaines de mouettes arrivaient d’on ne sait où pour entourer le bateau ! Elles le suivaient en criant et piaillant jusqu’à ce que les pêcheurs trient sardines, anchois et maquereaux et rejettent en mer le reste des poissons dont elles se régalaient ! C’était magique !…Debout pendant des heures, les hommes travaillaient sans relâche, et je leur aurai volontiers donné un coup de patte sans le roulis et l’odeur un peu incommodante des…. »

    - Ouais, c’est ça !! Marmonna Xavier en riant…tu as été malade ma jolie ! .

     Dans sa lettre, Félicité décrivait ensuite avec précision son arrivée sur le quai et la vente du poisson à la criée :

    « Je n’y comprenais rien tellement ça braillait de toutes parts…et puis encore cette odeur de poisson ! J’ai voulu partir très vite, et je me suis retrouvée par terre, les pattes en l’air à glisser sur le sol humide. Heureusement, un touriste anglais, très aimable (c’est le seul qui ne s’est pas mis à rire en me voyant) m’a gentiment aidée à me relever. On a sympathisé et il a proposé de m’emmener avec lui pour découvrir le charme du littoral en avion.

    Avec lui, j’ai ainsi pu survoler la Côte de Cornouaille, la presqu’île de

    Félicité la tortue - 3

    Crozon, la Côte des Légendes et la Côte de Granit Rose qui présentent une grande diversité de paysages exceptionnels…C’est beau à vous couper le souffle !!! Mais tu jugeras par toi-même sur les photos que je t’ai envoyées… c’est sympa non ? »

    Xavier prit l’enveloppe et en sortit une dizaine d’images représentant des vues d’avion, un personnage qui devait être Sezig, des filets de pêche regorgeant de poissons, des photos d’elle en train de lui tirer la langue et de faire des grimaces…et une mouette ! Pourquoi une mouette ? Se dit-il pour lui-même tout en continuant sa lecture.

    « Au retour l’avion a donné des signes de faiblesse. Je crois qu’il manquait simplement de Kérosène, mais le pilote n’a pas eu l’air de s’inquiéter. Moi si !. Nous avons atterri  de toute urgence sur une immense plage de sable blanc, avec quelques soubresauts, et je suis sortie verte de peur mais indemne.

    Quand elle nous a vus sortir du zinc complètement ahuris, une mouette rieuse est venue se poser sur un rocher proche en se moquant de nous.

    -         Alors, on veut voler comme les oiseaux, mais on est trop lourd !

    Elle était toutefois très gentille, et elle nous a apporté son aide en guidant  l’aviateur vers un garage, et moi, vers un terrain de camping en bordure de mer... Depuis, elle ne me quitte plus … »

    -         Ah ! C’est donc ça !

    « A présent, j’attends que tu m’envoies un scooter pour poursuivre mon voyage. Je ne suis pas très pressée, je profite de mes journées ici pour me reposer et me promener dans le dédale des ruelles du village. Je raffole de toutes ces impasses fleuries où se cachent d’adorables maisonnettes de pierres bordées d’énormes bouées d’hortensias roses, bleus et blancs.

    Souvent, j’aperçois de vieux bretons en sabots qui discutent sur le pas de leur porte en fumant tranquillement leur pipe. Je rencontre aussi  des femmes vêtues de longues robes noires, de tabliers blancs et d’une coiffe en dentelle assises sur un banc pour  broder de bien jolis habits très colorés.

    Félicité la tortue - 3

    Tu verrais comme elles sont habiles ! On dirait que leurs doigts n’ont jamais fait autre chose !

    Hier, je suis restée un long moment à les observer crocheter d’ adorables napperons. Soudain, l’une d’entre elles, la plus âgée je crois, m’a fixée quelques minutes, puis, en me regardant droit dans les yeux m’a lancé :

    -         E rankez beza pouezus « Paotrezig » evid ma taolche evez warnout an denig koz « Poupy »

           C’est dommage, je ne comprends pas un mot de breton ! Mais elle détachait chaque syllabe en prononçant ces mots, et cela devait être sérieux ! Je ne sais pas ce qu’elle a voulu dire mais en même temps son regard s’est déplacé vers le puits où j’ai cru voir quelqu’un ou un animal qui s’enfuyait.

        Je fais aussi de longues balades sur la plage avec Mirabelle (la mouette), mais j’hésite à aller me baigner…l’eau est bien trop froide !

    Je ne rentre au camping que le soir pour dormir sous la tente que j’ai eue bien du mal à monter, mais ça, c’est une autre histoire.

    PS : Tu trouveras facilement cette petite station balnéaire sur ta carte…elle est vraiment pleine de charme et située près de Roscoff. Je suis installée au camping des goélands.

        Xavier replia la lettre, ouvrit son livre de géographie et jeta un œil sur la carte :

    « Un scooter, rien que ça ? Quelle drôle d’idée ! Et puis une station balnéaire près de Roscoff, il doit y en avoir des dizaines ! …Ce n’est pas assez précis ! Comment faire ? » Se demanda Xavier. Il pensa aussitôt à son pote Pascal, le seul dans la confidence : « je vais lui en toucher deux mots…. lui, il saura »

        Dès le lendemain, sur le chemin de l’école, il tendit la lettre à son meilleur ami qui la lut d’une traite :

    -         Où est le problème ? Proclama-t-il en lui remettant les feuillets. Il suffit que tu dessines sur ta carte un scooter facilement reconnaissable à proximité de Roscoff, et que tu y accroches un carton avec le nom de « dame tortue » et son adresse.

    -         Tu crois que cela suffira ?

    -         A condition bien sûr que tu fasses ton croquis sur les terres et non sur l’océan ! ajouta-t-il en plaisantant

       Xavier s’exécuta sitôt rentré chez lui. Il grimpa les escaliers quatre à quatre, s’appliqua à reproduire sur sa carte un ravissant scooter rose (la couleur préférée de Félicité) et indiqua sur une grande étiquette vert pomme : « Félicité, camping des goélands », avec une petite note supplémentaire en bas à gauche : « et surtout sois bien prudente ! »

        Il faut croire que l’opération a réussi puisque à peine cinq minutes plus tard, l’engin avait disparu.

    Partager via Gmail Yahoo! Pin It

    votre commentaire
  • Belle journée à toutes et à tous,

    ça y est Félicité à pris la mer pour aller visiter la Bretagne...Ses aventures commencent.

    Avec de magnifiques illustrations réalisées par François...

    A demain pour la suite

    Félicité la tortue - 2

    Tempête en mer

       - Wouaouh ! Génial ! S’écria Félicité en se laissant emporter par la brise, semi-allongée dans son embarcation et légèrement grisée par les embruns qui lui balayaient le visage. Elle goûtait chaque instant de cette liberté toute nouvelle. Elle n’y connaissait strictement rien à la pratique de la voile, mais peu importe, elle s’en tirait bien malgré tout…

         Le vent gonflait les voiles dans un ronflement, la poussant rapidement le long des côtes atlantiques qu’elle découvrait avec bonheur. Elle appréciait la mer quelque peu agitée s’étendant à perte de vue et contemplait avec délice les falaises et les rochers offrant leurs remparts aux vagues menaçantes qui inlassablement, venaient s’y briser en grondant et en déversant des flots  d’écumes blanches et bouillonnantes.

        Ça et là, elle distinguait quelques villages et habitations éparses entourées de végétations, des ports encombrés de majestueux bateaux de pêche ou de plaisance, des plages de sable où elle imaginait des jeux et des rires d’enfants et  de nombreuses baies à l’abri des regards et du vent….

        Elle s’éloigna lentement et involontairement des côtes et ne vit bientôt plus que l’immensité de l’Océan et quelques mouettes qui volaient ça et là…elle ferma les yeux et se laissa bercer en essayant de retenir dans sa mémoire chaque contour du paysage qu’elle venait de longer, et c’est précisément vers l’une des criques qu’elle trouvait si charmantes que son voilier venait de faire face et qu’il se dirigeait à vive allure. Ignorant totalement les principes de bases de la navigation et ne sachant comment manœuvrer son bateau, Félicité ne put que se laisser guider.

    Félicité la tortue - 2

     

    Elle mit ses deux pattes devant ses yeux, craignant le pire …le bateau prit de plus en plus de vitesse et finit sa course sur un récif qu’il heurta violemment…Le choc fut néanmoins amorti par quelque chose de souple, elle n’aurait pas su dire quoi, mais cela tenait du miracle. Elle n’eut cependant pas le temps de se poser trop de questions, tout devint alors flou autour d’elle et elle sombra dans une semi-inconscience.

         Lorsqu’elle reprit ses esprits, elle releva doucement ses paupières pour constater qu’elle était simplement assise sur un banc de sable…Tout autour d’elle, de gigantesques rochers s’avançaient lourdement dans la mer…prise de panique, elle se demandait bien comment elle allait faire pour sortir de cette impasse lorsqu’elle prit conscience qu’elle était littéralement affamée. Elle s’aventura sur la roche humide et vit qu’elle était glissante et recouverte de moules, berniques, d’huîtres, d’algues odorantes et de petites cavités d’où sortaient de minuscules crabes rouges. Elle choisit de déguster un éventail de laitues de mer vertes et brunes qui s’apparentaient le plus à sa nourriture préférée, la salade. C’était un peu trop salé à son goût, mais…faute de mieux !

        Après ce repas très sommaire, elle contempla l’horizon où le soleil était en train de disparaître en laissant de larges traînées rougeoyantes dans le ciel ainsi que des reflets d’or et d’argent sur la mer parsemée de moutons gris.

    C’est alors que le ronronnement d’un moteur se fit entendre et qu’un canot se dirigea vers elle :

         -   Qu’est-ce que vous faites là ? lui demanda l’homme qui pilotait le bateau

    -         Mon voilier a échoué sur cette plage, et il me semble qu’il n’y ait pas d’issue, répondit tranquillement Félicité.

    -         Eh non ! Reprit l’homme qui vint à sa rencontre après avoir arrêté son moteur et stoppé son bateau sur la grève. Vous avez de la chance, je vous ai aperçue en me promenant sur la falaise. J’ai tout de suite compris que vous étiez en danger, alors je suis venu pour vous secourir.

    -         En danger ? Interrogea la tortue un peu déconcertée.

    -         Oui, vous n’avez pas remarqué que si la marée est encore basse, la mer remonte rapidement. Cette petite bande de sable sera bientôt complètement recouverte. En plus, un violent orage se prépare, Allez, montez vite dans le canot, je vais vous ramener sur la terre ferme et nous regarderons ensemble cette belle tempête d’un lieu plus sûr. 

       L’homme était vêtu d’un pull-over marin rayé bleu et blanc, d’une vareuse et d’un pantalon en grosse toile de coton bleu. Avec sa barbe et ses épais sourcils grisonnants, son crâne rasé sous un bonnet de laine rouge, il inspirait d’emblée la sympathie. C’est donc en toute confiance que Félicité le suivit.

       En chemin, Félicité lui fit part de son projet de visiter la Bretagne, et il se présenta (il s’appelait Sezig), lui répéta qu’elle avait eu beaucoup de chance et qu’elle se trouvait sur l’une des plus belles îles bretonnes. Lui-même était venu s’y installer il y a bien longtemps pour entretenir le phare qu’il estimait être le plus beau du territoire français, et ne retournait sur le continent qu’une fois par an pour revoir toute sa famille à l’occasion des fêtes de Noël.

    Félicité la tortue - 2

        La soirée était déjà bien avancée lorsque Félicité put enfin se reposer et se restaurer à l’intérieur du phare devant une énorme salade verte et un jus de fraise qu’elle sirota tranquillement avec une paille.

    Elle n’avait pas caché sa surprise en apercevant, perchée au-dessus de la falaise, cette haute tour de granit s’élever vers le ciel chargé de lourds nuages gris et noirs. Le gardien l’avait un peu réconfortée en lui assurant qu’elle ne craignait plus rien à présent, et que l’édifice, souvent confronté à des tempêtes spectaculaires, pouvait résister à des vents pouvant dépasser les  quatre cents kilomètres par heure.

    - Quand vous aurez terminé, je vous emmènerai sur le balcon pour assister à un spectacle extraordinaire dont vous vous souviendrez longtemps.

    -         Mais il fait nuit à présent !

    -         Attendez d’être là-haut.

    Félicité suivit Sezig qui disparut rapidement dans la spirale de marches qui n’en finissait pas. Au bout d’une demi-heure, elle n’était qu’à la moitié de son parcours et commençait à s’essouffler sérieusement lorsqu’elle entendit crier au-dessus de sa tête :

    -         Allez, du courage ! …Plus qu’une centaine de marches !!

    -         Pff, pff, pff

    -         Encore un petit effort !!

    -         Pff, pff, pff…

    A bout de souffle, Félicité se glissa sur la petite plate-forme où Sézig avait déjà pris place devant une baie vitrée.

    -         Ce soir, nous n’allons pas sortir sur la corniche, ce serait trop dangereux. Approchez-vous! Lui dit-il en la laissant passer devant lui.

    -         J’ai…un …pff, pff, …peu…pff, pff…peur…pff avoua Félicité qui, fatiguée après ces énormes efforts pour gravir les étages, frissonnait en entendant le mélange assourdissant des grondements du tonnerre, des puissantes vagues, de la pluie et du vent qui hurlait à l’extérieur.

    -         Ne vous inquiétez pas et regardez, c’est absolument grandiose !

        Félicité s’approcha de la vitre et ce qu’elle vit la fascina tout en lui donnant la chair de poule (si on peut parler ainsi pour une tortue !). De monstrueux éclairs zébraient le ciel, s’associant avec la puissante lumière du phare pour éclairer l’horizon en entier comme d’énormes projecteurs. Quelques secondes seulement pour découvrir une mer en furie secouée par une succession de vagues qui venaient se rompre violemment sur la falaise, déversant des montagnes d’écumes sur le phare avant de se désagréger en une fine poussière blanche.

    Elle fixa longuement son attention sur le mouvement incessant des éléments déchaînés, les yeux écarquillés et le cœur un peu chaviré par cette agitation démesurée. C’était beau et violent à la fois.

    Chaque jet de lumière dévoilant un ciel couvert de nuages compacts et  menaçants lui donnait une véritable sensation de malaise bien difficile à définir et à contenir.

    De plus, complètement étourdie par le rugissement des lames déferlant sur la roche, elle finit par se laisser envahir par une sorte de torpeur, et glissa doucement dans un sommeil profond. Avant de redescendre, Sézig la regarda longuement en souriant, puis il la recouvrit d’un plaid de laine à carreaux.

    Félicité la tortue - 2

        Cette nuit-là, Félicité rêva de Xavier. Il s’inquiétait pour elle et attendait de ses nouvelles. Elle se promit d’écrire dès le lendemain pour lui raconter cette aventure.

         Quand elle se réveilla, le calme était revenu et déjà, le soleil emplissait la pièce étroite. Elle se redressa et se dirigea vers Sezig qui l’attendait, debout sur le balcon. Elle risqua un œil en direction du paysage qui l’avait tant fait frémir la veille, et découvrit un panorama extraordinaire sur toute l’île et le continent qui lui faisait face au loin. Bien qu’elle fut sujette au vertige, elle resta longtemps éblouie par la beauté du site qui s’offrait à elle en se demandant comment il avait pu se transformer autant, l’espace d’une seule nuit. La fureur des éléments avait fait place à quelques ondulations à la surface de l’eau et des nuances variées de bleus, de l’indigo au turquoise, coloraient l’immensité du ciel et de la mer.

    -         Où comptez-vous aller à présent ? Lui demanda Sezig.

    -         J’aimerais bien faire le tour de l’île avant de repartir sur le continent, répondit-elle en observant le relief découpé de cette côte sauvage, les gros blocs de roches, les pointes, les anses, les plages de sable fin, les hameaux, le port qui s’avançait sur l’océan, les vestiges d’un château ancien, et, à l’intérieur des terres, les chemins sinueux bordés de bruyère, de genêts et de fougères.

    -         Je peux vous accompagner si vous le désirez. Allez hop ! Je vais atteler la carriole…je vous attends en bas.

        Sezig était indéniablement un guide précieux qui connaissait l’île comme sa poche, les moindres recoins, mais aussi d’incroyables anecdotes et récits historiques. Il enthousiasma Félicité en lui racontant la légende de ces deux jeunes amoureux transformés en pierres par les sorcières du village et qu’une bonne fée délivre les soirs de pleine lune. Il la fit aussi beaucoup rire en lui relatant l’épisode des méchants pirates qui se réfugièrent dans les grottes creusées dans les falaises, et qui ont dû attendre plusieurs semaines les fortes marées pour être délivrés… Elle se demanda même s’il ne l’avait pas inventé pour elle !

    Ils parcoururent des chemins étroits entourés de genets, d’ajoncs et de bruyère et longèrent un long moment le sentier côtier qui domine les falaises et la mer.

    -         Arrêtons-nous là, décida soudain Sézig, C’est à cet endroit que la nature offre le meilleur d’elle-même.

    -         Oups, que c’est haut, soupira Félicité prise de vertige tandis qu’elle penchait sa tête au-dessus de la falaise.

    -         Ce paysage est à l’image de ce que vous découvrirez sur le continent : une beauté sauvage, parfois féroce, mais tellement attachante avec ses couleurs intenses et tellement différentes tout au long de la journée. Et puis, respirez cette odeur puissante ! Un savant mélange de goémon et du parfum des plantes environnantes ! N’est-ce pas enivrant ?

    Assis côte à côte, ils discutèrent longtemps, se découvrant une passion commune pour la mer qu’ils contemplaient à l’unisson.

        Soudain, attirée par un léger bruissement, Félicité détourna la tête à l’instant même où une drôle de créature aux longues oreilles tombantes débouchait d’un talus tout proche… Frrt ! … Elle disparut aussitôt, la laissant perplexe.

    -         Vous avez vu? Qu’est-ce que c’était ?

    -         Probablement un lièvre, ils sont très répandus sur l’Ile et personne ne les chasse.

    Félicité la tortue - 2

       Bien qu’elle n’en fut pas absolument convaincue pour avoir cru distinguer un chapeau pointu, un gilet rouge et un pantalon rayé sur la créature, Félicité se contenta de cette explication…elle savait que son imagination lui jouait parfois des tours.

    -Allez, assez bavardé, il faut y aller à présent si vous ne voulez pas partir trop tard, affirma Sezig.

       Ils arrivèrent au port en fin de journée et le gardien du phare confia sa protégée à l’un de ses amis pêcheurs. Une pointe d’émotion les étreignit lorsqu’ils se séparèrent et ils se promirent de se revoir et de se donner des nouvelles de temps en temps.  Félicité embarqua sur le chalutier « la Marie-Joseph » pour une longue nuit de pêche en mer.

    Partager via Gmail Yahoo! Pin It

    votre commentaire
  • Bonjour,

    Pour ceux qui ne la connaissent pas encore et tous ceux qui ont envie de la retrouver pendant cette fin de vacances, voici Félicité,  la tortue, avec bien sûr les jolies illustrations de François...Un épisode par jour...

    Ensuite, dès la fin du conte, place aux histoires inédites ...

    Félicité la tortue

    Félicité

        Félicité la tortue naquit un beau jour d’automne sur une jolie feuille de papier blanc étalée sur le bureau d’un jeune écolier pendant un cours de mathématiques particulièrement ennuyeux. Il faut avouer que Milou - c’est le surnom du vieux professeur - avait bien du mal à intéresser ses jeunes élèves à autre chose qu’à ses cours de dessin et de gymnastique.

    Félicité la tortue

       Toute rigolote avec sa carapace ornée de larges taches de couleur verte, ses grosses pattes fripées, son léger strabisme et son air espiègle, Félicité leva sa tête toute ronde en direction  de son dessinateur et, à peine le dernier trait de crayon achevé, lui adressa un large sourire chargé de malice et de connivence.

        Légèrement surpris, Xavier le lui rendit, et tandis qu’il s’apprêtait à ouvrir la bouche, il entendit la grosse voix du professeur qui le sermonnait :

    -         Ça ne t’intéresse pas ce que je raconte, Xavier. C’est vrai qu’avec un magnifique trois en arithmétique la semaine dernière tu peux te reposer. Montre-moi ce que tu es en train de griffonner ! 

       Abasourdi, Xavier resta un instant la bouche béante, son regard se figea sur Félicité qui se redressa sur ses pattes arrières en lui tirant la langue, ce qui ne fit qu’accroître son malaise. Il fixa le professeur et ne put que bredouiller :

    Félicité la tortue

    -         Mais, je…vous écoute…monsieur…je…. 

    -         Apporte-moi ce papier et ne discute pas ! 

       Félicité s’échappa à temps, à  l’instant même où, tout penaud, Xavier prit son dessin pour l’apporter à Milou qui ne put que constater que la feuille était vierge.

    Le cours reprit mais ne capta pas pour autant l’attention du jeune élève qui ne comprenait rien à ce qui venait de se produire malgré lui. Avait-il vraiment passé l’heure à dessiner ? S’était-il endormi ?

       Pour en avoir le cœur net, il attendit la sonnerie qui annonçait la récréation et la sortie du professeur ainsi que de ses copains pour aller à la recherche de sa tortue, si tortue il y avait.

       Il regarda sur son pupitre, sous son livre, sur le sol, puis se décida à ouvrir son casier…C’est là qu’il la découvrit, bien calée entre sa trousse à crayons et son livre de géographie grand ouvert.

       Elle s’adressa à lui comme s’ils se connaissaient depuis toujours. Sa voix qu’il découvrait était celle d’une fillette originaire du sud ouest, chantante et légèrement traînante:

    -          Dis donc, c’est drôlement chouette ce qu’il y a dans ton livre…J’ai tout lu et cela m’a donné une idée. Tu n’es pas très fort en maths et malheureusement je ne peux rien faire pour toi. Par contre, j’ai pu entrevoir que tu n’excellais pas non plus en géographie, et là,  je crois que je peux t’aider à y prendre goût.  

    -         Ah ! Et comment ?

    -         J’ai décidé de partir en voyage et de visiter les différentes régions de France dont on parle dans ton livre, et éventuellement les pays que l’on voit sur la grande carte…je procéderai par étape, et je reviendrai très souvent pour te raconter mes séjours. Cela te donnera certainement envie d’apprendre. Qu’en penses-tu ?

    -         C’est sans doute une bonne idée, mais comment comptes-tu t’y prendre ? Tu n’es qu’une tortue…je ne te reverrai pas avant des années !!!

    -         Ne t’inquiète pas pour moi, je vais profiter de tous les moyens de transport qui existent et ils sont nombreux…et puis, je suis très maligne…Je ne suis pas une tortue ordinaire, tu n’as pas remarqué ?

    -         Mais oui, bien sûr, s’empressa de répondre Xavier en percevant la soudaine mauvaise humeur de Félicité qui semblait s’énerver et se vexer bien facilement. Mais…cache-toi vite, j’entends du bruit dans le couloir, je crois que la récréation est terminée. Tu m’exposeras tes projets après, d’accord ?

    -         Ok ! Répliqua la tortue en se faufilant dans le casier.

       Durant tout le reste de la journée, Xavier demeura songeur, il n’arrêtait pas de penser à Félicité et il déclencha la colère du professeur qui n’acceptait pas que l’on ne puisse se concentrer sur ses devoirs. Il fit quinze fautes dans sa dictée et déclencha l’hilarité générale quand il affirma que les hommes préhistoriques se déplaçaient à dos de tortue !

       Le soir même, Xavier rentra chez lui directement, sans prendre le temps de s’amuser avec ses copains comme à l’accoutumée. Il fila tout droit dans sa chambre à la grande surprise de sa mère qui n’eut pas le temps de terminer sa phrase après son bisou habituel :

    -         Alors, comment s’est pass…. ?

    Il ferma sa porte, ouvrit son cartable et laissa sa tortue sortir tranquillement et prendre place sur le bureau où régnait un désordre royal. Félicité inspecta les lieux, fronça les sourcils et lui reprocha de ne jamais terminer ses dessins :

    -         Regarde ! Ton bureau est recouvert d’ébauches, d’esquisses, de tracés inachevés au crayon, pastels et fusains …Comment veux-tu que je puisse compter sur toi pour mes aventures ?

    -         Dis-donc, c’est un peu grâce à moi que tu es ici non ? Alors, avant de rouspéter, explique-moi simplement ce que tu attends de moi.

    Xavier sentit la colère monter en lui. Félicité le perçut. Elle se radoucit aussitôt et l’implora :

    -         Pour voyager, j’ai vraiment besoin de toi, tu sais…

    -         C’est bon, dis-moi clairement en quoi je puis t’aider.

    -         Voilà, comme je te l’ai expliqué ce matin, j’ai découvert dans ton manuel de géographie des provinces que j’aimerais parcourir…pour cela, il faut que tu participes à mes périples en dessinant ce que je te demanderai.

    -         D’accord ! à une condition

    -         Laquelle ?

    -         Promet-moi de me tenir régulièrement au courant de tes aventures, en m’envoyant des cartes postales par exemple, et de revenir très vite.

    -         Ne te fais pas de soucis…dans quinze jours, un mois au plus tard, je serai de retour.

    -         Très bien. Alors, dis-moi, quelle destination tu as choisi.

    Toute émoustillée à l’idée de partir, Félicité se sentit pousser des ailes. Elle prit une longue inspiration et demanda à Xavier de lui dessiner une valise contenant au moins un maillot de bain, une serviette de plage, de la crème solaire, un parapluie, des bottes et un ciré, un appareil photo, une tente de camping et un matelas pneumatique pour passer les nuits… et un bateau assez grand avec des voiles roses.

    -         Tout ça ??

    -         Ah ! J’oubliais ! un téléphone portable aussi …

    -         Mais…Pour quoi faire ?

    -         Ben, pour te téléphoner, pardi ! On ne sait jamais.

    -         Tu ne m’as toujours pas dit où tu voulais aller ?

    -         Tu vas deviner facilement…Si je te dis que cette région se trouve à l’Ouest de la France et…

    -         Un voilier…un parapluie…de la crème solaire, énuméra Xavier en réfléchissant tout haut. Donc, un endroit au bord de la mer ou avec un lac. Il y pleut souvent, mais il n’y fait pas franchement froid puisque tu veux camper…C’est la Bretagne, non ? .

    -         Gagné…allez, c’est parti…prend tes crayons !

        Xavier s’empara de la boite de feutres qu’il gardait sur une étagère pour les grandes occasions et feuilleta son livre de géographie pour trouver une carte très nette de la Bretagne. Il l’observa un instant et entreprit de représenter un adorable dériveur sur l’Océan Atlantique, entre un groupe d’îlots où il espérait un jour aller prendre des cours de navigation, et la côte…

    Folle de joie, Félicité se précipita à l’intérieur et disparut aussitôt.

    Félicité la tortue

    Partager via Gmail Yahoo! Pin It

    votre commentaire